Mosaïques - Sublimer les lieux
Lors du chantier Learning From SKY en 2013, nous invitons l’architecte Carin Smuts à passer deux jours avec nous. Sur place, elle propose de travailler avec les enfants sur la récupération et le tri des débris de verres, de tuiles et de faïences qui jonchent le sol du quartier informel. Cela permet aussi de contribuer au nettoyage de l’orphelinat. Une fois récoltés, tous ces petits morceaux sont lavés, brossés, triés et classés en fonction de leurs couleurs et de leurs tailles. A partir de là elle met en place différents ateliers de réalisation de mosaïques destinées à recouvrir et décorer tous les ouvrages construits. Les mosaïques sont conçues en fonction des différents supports identifiés et selon des dessins produits également par les enfants.
Cette action était cohérente avec nos ambitions dans le sens où elle reliait très simplement architecture et éducation. Le thème des mosaïques possède en lui-même une forte dimension éducative. Il s’agit d’une opération de réutilisation, on donne une nouvelle vie à quelque chose qu’on croyait sans intérêt, un rebut, un déchet. Dans le cas des mosaïques, la réutilisation produit une transformation qui sublime les débris qu’on a trouvés mais aussi les ouvrages qu’on a construits ou simplement décorés. C’est un travail dans lequel l’utile et le merveilleux finissent pas se confondre, quoi de plus utile qu’un banc confortable et quoi de plus beau qu’une sculpture multicolore sur laquelle on peut s’asseoir.
Pour les enfants cet atelier était également une manière de s’engager dans un jeu, agir par le jeu. Il s’agit d’une notion qui est très importante dans les travaux d’enseignement que nous menons. Pour travailler, pour projeter, il faut que les étudiants soient en mesure de jouer, d’entrer dans ce processus actif que constitue tout jeu. Nous voulons le travail et le jeu. L’atelier de mosaïque de Carin malgré sa relative brièveté et le peu de moyens dont elle disposait, tirait sa pertinence de tout cela. Carin est une architecte très importante en Afrique du Sud, elle fait partie de ces architectes qui considèrent à juste titre que l’enfance est un moyen puissant en architecture, les enfants avec leur imagination, leur énergie, leur poésie et leur vacarme. Les enfants permettent d’agrandir les choses et l’architecture, de donner une ampleur aux lieux et de voir loin. C’est l’avenir. Comme elle le dit elle-même ce qui est engagé avec des enfants sur un projet se prolonge dans le temps. Et même leur rapport si sérieux au jeu est une leçon pour notre travail d’architecte, il s’agit bien de cela : jouer sérieusement.