Le dissensus dans la représentation
Le collage est un mode de représentation fondé sur le dissensus. Dans la représentation de dissensus, ce sont les conflits, les collisions et les dissociations qui opèrent, on y propose de circuler de mondes en mondes, sans liens déterminés, sans ressemblances prévues. Plus ces mondes sont étrangers et plus la collision promet d’être productive, narrative. C’est dans ce sens que Jacques Rancière écrit : « Ce que j’entends par dissensus n’est pas le conflit des idées ou des sentiments. C’est le conflit de plusieurs régimes de sensorialité ». Le “partage du sensible” est une dialectique, oscillation continue entre ce que l’on perçoit et ce qui est signifié.
En tant qu’outils de conception, les collages organisent des conflits, favorisent les contradictions, stimulent l’interprétation. Pour le concepteur, cela signifie travailler dans l’hétérogène, activer des régimes de représentation contradictoires, manipuler des multiplicités, enrichir la saisie des situations où le projet d’architecture doit intervenir.
Le chercheur Donald Schön affirme que la conception fonctionne sur le modèle d’une « conversation réflexive avec la situation ». C’est une sorte de processus critique et exploratoire. Il s’appuie sur des points de divergences, des disjonctions de descriptions, des images paradoxales, des métaphores capables d’élargir la perception de la réalité chez le concepteur. Le collage est à lire, à interpréter, à méditer… c’est une fiction dont la précision et l’étrange familarité rapproche l’architecte de l’écrivain ou du cinéaste.